Titre des articles de ce mesage du 18 juin (dernière mise à jour : 21h50)
- 1-Appel de la FAO pour les victimes du cyclone en Birmanie
- 2-À Kyon Ka Nan, la réhabilitation porte ses fruits sans l'aide de la junte
- 3-Selon Médecins sans Frontières, la population est traumatisée
- 4-«Viens dans mon village on n'a encore rien eu» (un article qui résume bien la situation)
- 1-Appel de la FAO pour les victimes du cyclone en Birmanie
Selon la première étude d'impact de fond réalisée par l'Organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation, 570.000 hectares de terres ont été submergées dans onze secteurs très touchés analysés par des experts de la FAO et du gouvernement birman.
Près de sept semaines après le passage du cyclone qui a fait 134.000 morts et disparus et 2,4 millions de sans-abri, la FAO a lancé un nouvel appel pour lever 83 millions de dollars de fonds au titre de l'aide agricole d'urgence et de long terme.
Nargis a détruit 85% des stocks de riz des paysans birmans et tué 120.000 animaux de trait. (Reuters via l'express)
- 2-À Kyon Ka Nan, la réhabilitation porte ses fruits sans l'aide de la junte
Seulement six des 300 maisons du village ont à peu près tenu lors du cataclysme qui a fait, selon un bilan officiel, au moins 133 600 morts ou disparus et 2,4 millions de sinistrés il y a près de sept semaines dans le sud du pays.
Des habitants du village côtier de Kyon Ka Nan disent que 114 personnes sont mortes ici, qu'ils n'ont reçu aucune aide internationale et que l'assistance gouvernementale a été extrêmement limitée.
Mais ils sont désormais engagés dans un effort de réhabilitation avec l'aide de citoyens ordinaires venus d'ailleurs et qui se sont fortement mobilisés en dépit de restrictions imposées par le régime militaire.
Les derniers secours acheminés dans la région par bateau comprenaient 22 tonnes de riz, 100 000 boites de conserves de poisson et une équipe de médecins.
Des hommes du village ont aidé à décharger les cargaisons de vivres et les ont transportées dans un temple bouddhiste, devenu le point de ralliement pour les opérations d'assistance.
De nombreux rescapés vivent désormais avec les moines et reconstruisent des habitations avec des tiges de bambou et tous les matériaux qu'ils peuvent récupérer dans les décombres de Kyon Ka Nan.
Les autorités militaires ont été sévèrement critiquées en Birmanie et à l'étranger pour le peu d'empressement qu'elles ont montré à porter secours aux survivants.
Même les volontaires birmans, en dépit des faibles moyens dont ils disposaient, déclarent avoir affronté de sérieux obstacles sur les routes avec d'innombrables barrages de sécurité qui ont ralenti la distribution de secours.
Deux opposants connus --le comédien Zaganar et le journaliste sportif Zaw Thet Htwe-- ont même été arrêtés après s'être rendus à plusieurs reprises dans le delta de l'Irrawaddy, la région la plus affectée par la catastrophe.
Lae Lae, Birmane de 39 ans qui a apporté de l'aide au village de Kyon Ka Nan, dit que son groupe a atteint plus de 40 villages dans ce secteur situé au sud-ouest de Rangoun.
«Les dons venaient de sources différentes, de moines, d'entreprises privées et de nos amis à l'étranger qui ont fourni de l'argent. Nous avons essayé d'agir dans des villages qui n'avaient pratiquement rien reçu», explique-t-elle.
Les volontaires se sont organisés selon leur spécialité.
Cinq jeunes médecins ont mis sur pied un petit hôpital de campagne dans un monastère, tandis qu'un second groupe a tenté d'assainir des réservoirs d'eau douce, souillés par des débris et des corps décomposés.
Les cadavres ont été incinérés mais les habitants redoutent encore de puiser dans ces mares et préfèrent utiliser de l'eau de pluie.
Un troisième groupe de volontaires s'est occupé de la nourriture en coordination avec le chef du village qui a établi une liste des familles rescapées et a organisé des distributions équitables.
«Depuis le passage de Nargis, nous avons subsisté grâce à l'aide de ces groupes privés», dit Win, en faisant la queue, parmi d'autres femmes, pour obtenir une ration de nourriture.
Win précise que depuis le 3 mai, les aides officielles qu'elle a reçues se sont limitées à 13 bols de riz, quelques pommes de terre et une bâche en plastique donnée par l'Association locale de la Croix Rouge.
Les habitants de Kyon Ka Nan vivent de la pêche et de la riziculture mais Win se plaint de la destruction des stocks de riz. «On peut trouver facilement du poisson et des légumes. Nous avons besoin de riz». (cyberpresse)
- 3-Selon Médecins sans Frontières, la population est traumatisée
Certaines des communautés les plus touchées continuent à demander de l'aide, mais d'autres n'arrivent pas à imaginer comment faire face à la nouvelle situation. "Ma rencontre avec une femme qui ne trouvait plus la volonté de manger ne m'a donné qu'un léger aperçu de la souffrance de milliers de gens dans les zones les plus touchées." raconte Kaz de Jong, spécialiste à MSF de la santé mentale qui revient d'une évaluation dans le delta d'Irrawaddy. "Elle expliquait qu'elle nous remerciait pour la nourriture qui était distribuée mais elle demandait également si nous pouvions aussi lui donner l'envie de manger."
Autre rencontre marquante, celle avec une grand-mère serrant dans ses bras un enfant: "Je suis redevenue mère - toute ma famille a disparu - il n'en reste que deux, ce bébé et moi." a-t-elle expliqué. Les moins touchés utilisent leurs mécanismes d'adaptation naturels; ils s'efforcent de se regrouper pour s'entraider et organiser la communauté. Ceux qui vivent dans les zones qui ont été les plus lourdement touchées vous fixent le regard vide, leurs mécanismes d'adaptation naturels anéantis, dans des communautés éclatées.
La perte de nombreux proches, la destruction de villages entiers, mais aussi la nécessité de retourner sur les lieux de la catastrophe ou encore la vue des cadavres qui remontent à la surface de l'eau sont autant de facteurs de troubles psychologiques.
Ils s'expriment sous la forme de léthargie, tristesse ou dépression profonde, anxiété, insomnie, hypertension, palpitations... MSF a intégré un programme psychosocial dans la réponse d'urgence dans les régions de Labutta et Hangyi. Une équipe de professionnels de la santé est chargée de sensibiliser les communautés et de détecter ceux qui ont besoin d'assistance psychologique. Des psychologues birmans (ayant suivi une formation supplémentaire dans le traitement des traumatismes), qui travaillent pour MSF depuis longtemps, se rendent dans le delta. (newpress)
J'avais déjà abordé ce problème dans mon message du 7 juin Birmanie, les "sans abris" en danger :
Pour Rappel :
Un aspect dont on parle moins : la santé mentale des rescapés
Parmi les rescapés, une grande partie est toujours sans abri et ce sont les plus vulnérables, tant physiquement que psychologiquement.
- Selon l'association Action contre la Faim, il existe des craintes importantes, relayées par des témoignages frappants. Les personnes qui ont perdu leur famille et ont été obligées de quitter leurs villages sont forcement choquées.... Nous soupçonnons bien sûr aussi fortement que ce cyclone ait eu des conséquences graves sur la santé mentale des enfants eux-mêmes. Ils peuvent par exemple, s’ils ont perdu leurs parents, perdre aussi leur appétit.
- Le représentant de l'Unicef en Birmanie explique que dans ce genre de situations où les enfants vivent des situations qui les plongent dans un stress intense, il est important pour leur bien-être de mettre à leur disposition un espace dans lequel ils se sentent en sécurité et où ils peuvent retrouver un peu de normalité.
- L’équipe du programme Birmanie de l’ONG Médecins Sans Frontières (MSF) explique que de nombreux survivants souffrent de dépression et autres troubles psychologiques qui les empêchent de reconstruire leur vie.
Kaz de Jong, l’un des spécialistes de santé mentale de MSF indiquait aux journalistes lors d’une conférence de presse au Club des Correspondants étrangers de Bangkok, que 40% des personnes sondées par les 43 équipes médicales de l’ONG présentaient des signes de troubles psychologiques. "De nombreuses personnes sont très déprimées, anxieuses, les gens ont du mal à dormir la nuit, effrayées que quelque choses arrive de nouveau, ils revivent le désastre et voient leurs proches revenir dans leurs rêves"
- 4- «Viens dans mon village on n'a encore rien eu»
Les cadavres qui jonchaient la zone du delta de l'Irrawaddy, dévasté par le passage du cyclone Nargis les 2 et 3 mai, ont quasiment disparu du paysage. Mais, un mois et demi après la catastrophe, qui a fait officiellement 133.600 morts ou disparus et 2,4 millions de sinistrés, la situation reste «inquiétante», affirment les humanitaires sur place. «La réponse apportée aux personnes affectées reste incomplète», assure Action contre la Faim (ACF).
L'ouverture totale à l'aide étrangère, promise par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki Moon, lors de sa visite dans le pays le 22 mai, n'est pas effective. ACF a ainsi eu l'autorisation d'envoyer trois de ses expatriés seulement la semaine dernière, alors que douze personnes étaient venues en renfort des équipes locales.
«De la même manière que la fermeture n'a pas été totale au début, l'ouverture ne sera pas totale», pronostique un diplomate européen à Rangoun. Seuls les experts des pays de l'Association des nations d'Asie du Sud-Est (Asean) et des Nations unies vont avoir un accès total aux zones touchées par le cyclone.
La phase d'urgence n'est pas finie
Pourtant, la phase d'urgence est loin d'être achevée, contrairement à ce que martèle la junte militaire depuis le milieu du mois de mai. Dans le delta, certaines populations, isolées au milieu d'un no man's land difficilement accessible, n'ont encore reçu aucune aide.
«On découvre encore des villages», souligne un humanitaire de Médecins sans frontières. «La semaine dernière, raconte-t-il, un homme m'a pris par le bras. Il m'a dit : "viens dans mon village, on n'a encore rien eu". On est parti. Sur place, une dizaine de personnes attendaient au bord de la rive, sous une pluie battante. Ils guettaient notre arrivée, parce qu'ils savaient que quelqu'un était parti chercher du secours».
Pas d’épidémie en vue
Jusqu'à présent, MSF a réussi à apporter de l'aide à 300.000 personnes, et effectué 17.000 consultations. Les sinistrés qu'ils rencontrent ont survécu avec les moyens du bord. Certains se sont contentés d'eau de pluie, sans la bouillir. L’organisation humanitaire est ainsi essentiellement confronté à des cas de diarrhées, mais aussi des infections respiratoires, dues à l'exposition des victimes aux intempéries avec l'arrivée de la mousson, et des dépressions psychologiques, certains survivants ayant vu leur famille décimée par le cyclone.
Quelques cas isolés de choléra ont été observés, mais aucune épidémie ne semble en vue, contrairement à ce que redoutaient les ONG il y a deux semaines.
Les humanitaires travaillent également au nettoyage des «pounds», ces réserves d'eau qui alimentent des villages entiers. Salés après le passage du cyclone, leur eau est devenue non potable. «Parmi les priorités, les victimes nous ont demandé de s'occuper de ces puits, explique MSF. On les nettoie, on les vide, et l'eau de la mousson, particulièrement forte cette année, les remplit assez vite».
Les activités agricoles en péril
La première phase d'urgence n'est pas achevée qu'une deuxième se profile: la reprise des activités économiques, cruciale. En effet, si les agriculteurs ne parviennent pas à semer le riz à temps dans le delta, le grenier de la Birmanie, ils rateront la récolte. «La saison du repiquage dans le delta va de juin à juillet, après quoi il sera trop tard et les conséquences seront désastreuses pour la sécurité alimentaire en Birmanie et dans la région», a averti vendredi Noeleen Heyzer, la secrétaire de la Commission économique et sociale des Nations unies pour l'Asie et le Pacifique. Or, «ce n'est pas sûr que la population puisse le faire à temps», redoute ACF. A ce jour, l'activité du riz et de la pêche, capitales dans cette région, reste «compromise».
La junte «n’a pas de solution à proposer»
Dans cette deuxième phase d'urgence, qui s'imbrique avec la première, la population a besoin de semences adaptés aux champs, salés eux aussi après le passage du cyclone, mais aussi de bétail. «Pour l'instant, le gouvernement en est encore au stade de la réflexion, observe un Birman. Il semble conscient du problème, mais n'a pas de solution à proposer. Il a évacué rapidement les camps de réfugiés pour que les fermiers retournent au travail et sèment, en pensant qu'ils allaient se débrouiller tous seuls.»
La junte ne semble en effet pas savoir comment gérer cette catastrophe. «Elle ne voit la situation que sous l'angle sécuritaire», juge un observateur local. Ce qui explique son refus de laisser tous les experts étrangers pénétrer dans le delta, «alors qu'elle-même n'a quasiment rien fait pour aider les gens».
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