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samedi 27 septembre 2008

Birmanie, «Il n'y a pas de raison d'être optimiste»

Une réunion de l’ONU est consacrée à la Birmanie ce samedi à New York. Un an après la révolte des moines dans les rues de Rangoon et vingt ans après la création du principal parti d’opposition, la LND d’Aung San Suu Kyi, RFI fait le point sur la situation des droits de l’homme dans ce pays avec Mireille Boisson coordinatrice Birmanie à Amnesty Internationnal France.


RFI : Cela fait 20 ans que la Ligue nationale pour la démocratie a été créée. Cela fait 20 ans, juste aujourd’hui, et son leader, l’opposante Aung San Suu Kyi est toujours en résidence surveillée.

Mireille Boisson : Et elle risque de l’être encore longtemps. Mais elle a vu trois fois son avocat, en août, en septembre et elle va déposer un recours contre l’illégalité de sa détention.

RFI : Une bonne nouvelle quand même, mardi dernier, sept prisonniers politiques ont été libérés. Nous avons sur notre antenne, Win Tin, le célèbre journaliste qui est le plus ancien détenus de ce pays. Il nous a dit qu’il était pessimiste sur les capacités de changement de la junte.

Mireille Boisson : Même si Aung San Suu Kyi dit : « Il faut garder le dialogue ouvert même avec les militaires », on peut être pessimiste sur leur capacité à se réformer. Maintenant, il faut dire que Win Tin sort quand même de 19 ans de prison, qu’il a pu être coupé de certaines réalités ; il a vécu dans des conditions très difficiles, puisqu’il a même été dans un chenil, dans une cage à chiens, pendant plusieurs mois d’hiver, sans couverture et sans hygiène.

Mais il n’y a pas de raison d’être optimiste, sauf si la Chine et l’Asean (l’Association des nations du Sud-Est asiatique) mettaient leur poids dans la balance. Il y a eu ce référendum en plein cyclone, pour approuver largement à plus de 92% une Constitution qui exclut Aung San Suu Kyi et ils vont continuer avec cette Constitution complètement inique.

RFI : D’un côté, on libère des prisonniers politiques ; de l’autre, on en arrête.

Mireille Boisson : On continue d’arrêter. Même parmi les sept détenus qui ont été libérés, il y en a un qui a été arrêté de nouveau le lendemain même, dans une prison qui est loin, dans le nord. Et peut-être ce qui est tragique, c’est cette jeune femme Nilar Tine, qui était mère d’une petite fille, qui a maintenant seize mois - dont le mari a été dans les premiers arrêtés, le 22 août 2007 - qui était passée à la clandestinité. Il y a une dizaine de jours, Nilar Tine a été arrêtée à son tour

RFI : Il y a aujourd’hui des policiers, des soldats, des barbelés dans les rues de Rangoon, et pas de touristes... Il y a un an, il y avait la « révolte safran », la révolte des moines. La rue peut-elle encore se soulever aujourd’hui en Birmanie ?

Mireille Boisson : Je crois que la rue a peur. En fait, il y a des gens très jeunes qui font des tags NO (non), comme au référendum, des graffitis qu’on leur a appris à faire à la bombe. Mais une véritable action structurée... les moines ont été trop détruits, ils ont trop perdu leur pouvoir pour pouvoir espérer qu’ils vont reprendre le risque. Et puis, les vrais leaders sont emprisonnés ou assignés à résidence »

RFI : Qu’en est-il de l’information, des moyens d’informer, de la presse en Birmanie ?

Mireille Boisson : Grâce à des gens comme vous, Dieu merci, ils ont quelques sources d’information ; parce que comme disent les Birmans : « Si c’est dans le journal, c’est que ce n’est pas vrai ». Mais les journalistes qui osent simplement rapporter un double-meurtre se retrouvent en prison et on leur dit : « On va suspendre votre journal ».

RFI : Et l’Irrawaddy, le site internet de l’opposition a été piraté.

Mireille Boisson : Oui, ça c’est une des très bonnes sources d’information. Il a de très bons contacts. Celui de la DVB qui est en Norvège et qui émet sur la Birmanie et la Thaïlande a eu une tentative de piratage aussi (Democratic Voice of Burma). Ils ont tous été victimes de virus, de choses comme cela, et d’après l’Irrawaddy, la junte aurait envoyé des gens se former en Russie, au brouillage des sites informatiques ».

Entretien réalisé par Stéphane Lagarde pour RFI

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