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lundi 9 juin 2008

Birmanie, tout est loin d'être "rentré dans l'ordre..."

L'ancien président de Médecins sans frontières, Rony Brauman, semble avoir un point de vue un peu différent de tout ce que l'on a pu lire ces derniers temps, puisque pour lui, les birmans ne sont pas en danger de mort imminente.

Il a sans doute raison sur le plan purement médical, mais le problème est bien plus grave car à moyen terme et à long terme le peuple Birman est vraiment en danger

Rony Brauman, dans cet article publié ce jour par l'Orient le jour, "analyse l’efficacité de l’assistance et la nécessité ou non de l’imposer dans certains cas"


Remarques préalables :

Je pourrais ajouter cet article, notamment le passage intitulé : "imposer l'aide", dans ma liste des articles "CONTRE" une intervention forcée,
Rony Brauman, étant opposé à "toute contrainte" (pour rappel lire: Intervenir de gré ou de force ?)

Je ne crois pas un seul instant à la bonne foi du chef de la junte, Than Shwe et même si des concessions ont été accordées par la junte, on sait très bien pourquoi : uniquement pas peur que la communauté internationale se mêle de sa politique, la junte veut pouvoir continuer en toute tranquillité et en toute impunité ses crimes.

Le véritable danger pour les Birmans, ce n'est pas le risque d'épidémie mais la junte elle même, ainsi, même si comme le souligne
Rony Brauman "ils ne sont pas menacés de mort imminente.." ils sont en danger tout de même.

Si vous êtes un lecteur assidu de ce blog, (il doit bien y en avoir un ou deux quand même...) vous connaissez ma position sur ce point,
je ne vais pas la développer de nouveau ici (concernant la junte, on ne peut pas séparer l'"Humanitaire" du "Politique", )

Monsieur Brauman me semble quand même un peu trop confiant lorsqu'il dit :

« Tout cela permet d’être plus confiant qu’au début de la crise »

Connaissant la junte, on peut redouter le pire pour les Birmans, non dans l'immédiat, (ils ont déjà eu le pire) mais pour les mois à venir.


Voici de larges extraits de l'article:
  • L’aide humanitaire internationale en question
(...)Rony Brauman, spécialiste de la question et ancien président de Médecins sans frontières, revient sur la question de l’efficacité de l’aide internationale, du rôle des médias et de la nécessité, ou non, d’imposer l’aide dans certains cas, comme celui de la Birmanie.(...)


L’efficacité de l’aide « dépend avant tout de l’évaluation correcte des besoins » par les organisations et surtout de « l’expérience des personnes qui sont sur le terrain (pompiers, militaires, fonctionnaires d’ONG)... »

(...) il faut également prendre en compte les capacités de réponses adaptées. En Birmanie, ces conditions ne sont pas vraiment réunies, il n’y a pas de gens expérimentés sur le terrain », affirme M. Brauman.

Pour éviter ce genre de situation, il n’y a qu’une seule solution : «Il faudrait que les gouvernements des pays touchés par une catastrophe assurent une sélection des ONG qui proposent des secours et qu’ils exigent que ces organisations aient un minimum d’expérience dans ce domaine », estime M. Brauman.

Le rôle des médias

Les médias jouent également un rôle important lors de la gestion des catastrophes naturelles.
"Les médias crédibles et les autorités crédibles sont des instruments très précieux de la gestion des crises"(...) La Chine est à ce niveau, un bon exemple. Le régime chinois, d’habitude très fermé et qui impose une censure stricte, a fait preuve de transparence (..)

Dans d’autres cas, les médias jouent un rôle plus pervers. Lorsque les médias diffusent une fausse alerte, ils ont un rôle considérable d’amplificateur. "En ce qui concerne les secours d’urgences, certains médias créent de fausses nouvelles accompagnées de croyances infondées" explique M. Brauman. Les questions d’épidémies (avec risque de mortalité) et de famines en Chine ou en Birmanie occupent par exemple une place importante dans les médias aujourd’hui, "or le risque est extrêmement faible." Il faut fonctionner par priorité (...)


Imposer l’aide ?

Ces derniers jours, la communauté internationale s’est indignée face au refus de la junte birmane de faciliter l’accès de l’aide aux sinistrés du cyclone Nargis. Un comportement qui a posé la question de l’imposition de l’aide.

« Ce qui se passe en Birmanie n’est pas une situation commune, un pays qui se verrouille à ce point face à l’aide internationale est rare. Dans ce cas, il faut être capable d’exercer une pression avec tact, il ne faut pas faire perdre la face au régime, il ne faut pas que l’aide soit perçue comme une concession de la part de la junte », insiste M. Brauman.

« La Birmanie semble être plus ouverte à ses voisins et alliés asiatiques, il y a d’ailleurs une pression continue de ces derniers sur le régime pour qu’il ouvre ses portes à l’aide. Le chef de la junte, par son déplacement dans les zones sinistrées, prend conscience de l’ampleur du désastre, je ne sais pas si le problème sera résolu, mais pour l’instant les choses vont dans le bon sens », explique M. Brauman.

De fait, s’il a mis longtemps à réagir, le régime militaire a finalement entrouvert ses portes récemment, laissé des bateaux chargés d’aide accoster sur ses côtes, accueilli plus d’avions et accordé des visas à certains humanitaires. « Tout cela permet d’être plus confiant qu’au début de la crise », affirme le médecin.

« L’aide est importante certes, mais il ne s’agit pas de secours vitaux. Nous ne sommes pas dans une situation où une maison brûle, les habitants sont dedans et les pompiers à l’extérieur regardent avec impuissance les habitants mourir brûlés vifs. Oui, les Birmans sont dans une immense précarité, ils sont dans une détresse affective et économique, mais ils ne sont pas menacés de mort imminente. Il n’y a pas d’épidémies, pas de famine », insiste M. Brauman.

Les travailleurs humanitaires envoient des ustensiles de cuisine, des bâches en plastique pour récupérer l’eau de pluie, des pastilles qui désinfectent l’eau, des vivres pour remplacer les stocks détruits. « Il n’y a pas de chirurgie, de vaccination, de réponse à la famine. Je ne dis pas que les Birmans n’ont pas besoin d’aide, bien au contraire. Mais répondre à une extrême précarité n’est pas la même chose que de répondre à un danger de mort », explique le spécialiste.

La communauté internationale répète « que chaque heure compte, qu’il faut forcer un passage pour acheminer l’aide. C’est un mauvais diagnostic », s’exclame l’ancien président de Médecins sans frontière.

« Il ne faut pas, en outre, un mécanisme de contrainte en général. Les effets de la contrainte sont pires que la situation à laquelle cette contrainte veut répondre. Elle créera ensuite des crispations, un bannissement des étrangers. Nourrir un discours facile se résumant à une dénonciation de la dictature, ce n’est pas rendre service à la population », affirme M. Brauman.

remarques : Sur ce point je suis d'accord si on intervient de force pour l'humanitaire uniquement ce serait pire pour les Birmans ensuite.
c'est bien pour cela que j'ai toujours pensé que l'on ne pouvait pas séparer l'humanitaire du politique en Birmanie,



Le processus de vérification

La gestion des crises doit également faire face à un autre défi : comment être sûr que l’aide parvient effectivement aux sinistrés dans des pays « peu démocratiques » ? ("une des pires dictature au monde" conviendrait mieux- Kathy )

« Le seul moyen d’être sûr que l’aide arrive aux sinistrés, c’est d’avoir sur le terrain des personnes indépendantes », explique le spécialiste.

Une condition impossible à remplir en Birmanie, où les travailleurs humanitaires déployés sur le terrain sont essentiellement birmans. « Ces personnes ne sont pas en mesure de résister aux pressions des militaires birmans. Étant donné la situation, on ne peut qu’espérer que les autorités fassent passer une quantité raisonnable de secours », ajoute M. Brauman.

« Dans le cas contraire, la population va probablement finir pas protester, manifester. Il ne faut pas sous-estimer la population, ce n’est pas un sujet passif, mais un acteur de l’aide », souligne le spécialiste. L’aide d’urgence (les abris, la nourriture...), ce sont les sinistrés eux-mêmes qui l’assurent. « Les sinistrés ne sont pas passivement soumis. C’est un véritable enjeu humain, social et politique », estime le médecin. « De toutes les manières, il faut rester lucide, il ne peut y avoir un véritable contrôle total de l’arrivée de l’aide aux sinistrés », conclut Rony Brauman.

Source (Lire cet article en entier) :L'Orient le Jour


Remarques En gros, Rony Brauman nous dit en conclusion que l'on sera vraiment si "les autorités ont fait passées une quantité raisonnable de secours" en fonction de la réaction des Birmans! si ce n'est pas le cas, les birmans finiront par manifester !

Mais on sait déjà que les autorités n'ont pas fait passer assez d'aide pour les sinistrés, cela ressort de très nombreux témoignages de Birmans eux mêmes, de témoignages de moines, et des ONG présentes sur place. Tout le monde s'accorde sur ce point, alors pas besoin d'attendre que les Birmans se fassent massacrer en manifestant pour répondre à cette question.

Comment peut-on faire confiance à des généraux qui se rendent coupables depuis des années de "crimes contre l'humanité"?

Les Birmans n'ont pas le droit de manifester ou au péril de leur vie.
Les Birmans qui manifestent
sont, pour le coup, menacés de mort imminente.
De nombreuses personnes ont été arrêtées, torturées et/ou tuées à la suite des manifestations du mois d'août 2007 et la junte a pu faire cela en toute impunité.

Comment voulez vous dans ces conditions que les sinistrés manifestent? il y aura sans doute des tentatives de manifestations mais la junte les réprimera dans le sang comme elle l'a toujours fait.

Sans notre aide, les Birmans ne pourront rien faire contre la junte.


En tout cas, comme je le faisais remarquer dans mes "remarques préalables", la position de
Rony Brauman, ancien président de Médecins sans frontières, est loin d'être unanime:

J'en ai déjà parlé dans mes deux derniers messages, mais vu la teneur de l'article ci dessus, il est bon de rappeler que pour Amnesty International il ne fait aucun doute que le gouvernement du Myanmar expose les survivants du Cyclone à des dangers accrus


D'ailleurs, Médecins du Monde ne sont pas aussi confiant que l'
ancien président de Médecins sans frontières :Les priorités de l'aide portent toujours sur la satisfaction des besoins de base : nourriture, fourniture d'eau potable et d'abris pour les intempéries. La mise en place d'un système de surveillance épidémiologique pour une détection précoce de la survenue d'épidémies et une analyse fine des problématiques de santé sont également importantes à ce stade.

Si le personnel birman est compétent pour la prise en charge des consultations médicales au profit des personnes sinistrées, les interventions des organisations humanitaires gagneraient en efficacité si des intervenants expérimentés en matière de médecine de catastrophe pouvaient intervenir. En effet, les volontaires expatriés se trouvent toujours, à ce jour, dans l'impossibilité de sortir de la ville de Rangoon, l'ancienne capitale.

«Malgré les compétences de nos équipes nationales birmanes, nos interventions restent pénalisées. L'expertise de nos équipes expatriées, rompues aux urgences, n'est pas optimisée. Les volontaires expatriés assurent donc depuis Rangoon le pilotage de nos activités ainsi que la formation accélérée des équipes nationales birmanes» souligne Pierre Micheletti, président de Médecins du Monde.

Médecins du Monde demande aux autorités birmanes de tout mettre en oeuvre pour alléger les entraves administratives qui limitent nos déplacements sur site et optimiser ainsi l'aide et le soutien apportés à la population affectée par les conséquences du cyclone Nargis. (MdM)

Par ailleurs l'ONU continue de parler d'Aide vitale:

Les six hélicoptères de l'ONU ont été autorisés à se rendre dans des villages reculés du delta de l'Irrawady, la zone la plus touchée, pour apporter une aide vitale aux rescapés.

C'est une aide précieuse et surtout vitale qui a été apportée lundi aux rescapés de Birmanie.

Plus de cinq semaines après le passage du cyclone Nargis qui a dévasté le pays, six hélicoptères de l'ONU ont été autorisés à se rendre dans des villages reculés du delta de l'Irrawady. La zone la plus touchée par la catastrophe.

Jusqu'à présent, l'aide était principalement acheminée par bateaux, ce qui prenait plusieurs heures. Grâce aux hélicoptères, les secours ont pu permettre aux travailleurs humanitaires d'apporter directement de l'équipement lourd comme des systèmes de purification d'eau. D'ici mardi, 26 villages reculés auront été atteints.

Quatre hélicoptères supplémentaires devraient arriver en Birmanie avant la fin de la semaine. Le cyclone Nargis, qui a ravagé les 2 et 3 mai de vastes régions du sud de la Birmanie, a fait au moins 133.600 morts ou disparus, selon un bilan officiel. Au moins 2,4 millions de personnes ont été touchées par le cyclone Nargis et plus d'un million a toujours besoin d'aide principalement dans le delta de l'Irrawaddy, selon l'ONU. (europe1)

Rappel:
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  • Les opérations humanitaires en Birmanie Avec Alexandre Baillat, membre de la mission de Médecins sans frontières en Birmanie
Extraits

(...)Je suis de retour de la ville de Bogalay ou j ai passe 15 jours. Il est difficile de poser des mots sur la situation a laquelle j ai été confronté sur ma mission mais je suis conscient qu il est de mon devoir de mettre des mots sur une situation réelle (...)Nous sommes toujours dans un contexte d urgence et il est necessaire de continuer les efforts de mobilisation pour permettre à l'action sur le terrain de continuer (...)
il est important de relater la situation vécue par les populations qui tentent de survivre aujourd'hui. Il faut savoir qu'aujourd'hui encore, certaines familles survivantes n'ont pas accés à l'eau potable ou peu et ont épuisé leur mince réserves de riz.

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